Après une dizaine d’année de vélo dans ma jeunesse de quatorze à vingt-quatre ans entre 1968 et 1978 avec l’ASPTT Paris, je me suis consacré exclusivement à l’escalade et à l’alpinisme pendant 23 ans. En 2001, à 46 ans et après 22 ans sans vélo, j’ai décidé de m’y remettre à l’occasion de l’Etape du Tour Tarbes Luz-Ardiden qui se déroulait dans mes chères Pyrénées. En février, je me suis acheté un vélo et j’ai découvert les pédales automatiques et les changements de vitesse au guidon que je ne connaissais pas. J’ai réussi à terminer cette étape qui passait par le col d’Aspin et le col du Tourmalet avant la montée vers Luz-Ardiden avec seulement 1500 km d’entraînement et dans des conditions climatiques difficiles – deux degrés et neige au sommet du Tourmalet – qui avaient entraîné l’abandon de plus du tiers des concurrents. Je n’imaginais pas que ce serait le début d’une longue série. En effet, depuis 2001, j’ai participé à toutes les éditions de l’Etape du Tour y compris les deux années où ASO organisa deux étapes du Tour et cette épreuve a donc pour moi un aspect symbolique.
Cette année, c’était donc ma vingtième participation. Pour fêter cet anniversaire, j’ai cherché avant tout à me faire plaisir en gérant mes efforts sereinement pour profiter du très beau parcours sans objectif de résultat.
12 993 concurrents étaient au départ et je suis parti dans le sas 3.
Vingt-cinq de kilomètres de plat autour du magnifique lac d’Annecy dans une belle lumière matinale nous menaient au pied du petit col de Bluffy avant une descente de trois kilomètres et une dizaine de kilomètres de plat jusqu’à Thônes où commençaient les vrais difficultés avec le col de la Croix Fry (1467 m – 12,8 km à 6,5%). Je connais bien ce col pour l’avoir gravi à plusieurs reprises lors de la Megève – Mont Blanc. J’ai adopté un rythme prudent. Après un début assez roulant, je n’ai pas été surpris par les trois kilomètres raides au-dessus du village de Manigod avec quelques passages à plus de 10%. J’ai bien profité des belles vues sur le massif des Bornes et le massif des Aravis sans oublier de m’hydrater car le soleil commençait à réchauffer l’atmosphère. Au sommet, j’ai fait un court arrêt pour refaire le plein de mon bidon et manger une barre énergétique avant une longue descente par la Clusaz et Saint-Jean de Sixt où de nombreux spectateurs nous encourageaient. Dans le défilé des Etroits, la température était très fraîche avant d’arriver au pied de la montée vers le Plateau des Glières présentée comme l’épouvantail de cette étape avec 6 km à 11,2% de moyenne. Cette année, j’ai du mal dans les gros pourcentages et cette ascension que je ne connaissais pas me faisait peur. Elle se déroule principalement en forêt et n’était donc pas trop exposée au soleil. J’ai mis mon 34×32 dès le début et adopté un rythme très prudent pour ne pas me mettre dans le rouge. Habitué aux cols basques réputés pour leur raideur, j’ai finalement trouvé que cette ascension n’était pas aussi redoutable que je le craignais car il y a de nombreux virages et quelques passages moins raides qui permettent de récupérer. Arrivé sur le Plateau des Glières, haut lieu de la Résistance, la vision de centaines d’emballages jetés sur la route m’a dégoûté. Comment peut-on manquer à ce point de respect dans un lieu aussi symbolique en dépit de tous les panneaux posés par les organisateurs pour demander aux participants de ne pas jeter leurs déchets sur la route. La particularité de cette étape consistait ensuite à emprunter une portion non goudronnée de deux kilomètres jusqu’au col des Glières. Il n’y avait pas de quoi s’en faire une montagne car les gravillons étaient bien nivelés et bien tassés et je n’y ai vu ni chute ni crevaison. Après un nouveau plein des bidons au sommet, j’ai été très prudent dans la descente surtout après avoir vu les secours remonter avec des cordes un cycliste tombé dans le ravin après être passé par-dessus la glissière de sécurité.
Après Thorens-Glières, débutait la montée de sept kilomètres du col des Fleuries (930 m – 5,6 km à 4,5%) assez roulante dans laquelle j’ai cependant veillé à ne pas trop entamer mes forces vu les difficultés restant à franchir. Au sommet, je me suis arrêté pour manger un peu de fromage et quelques fruits et remplir mes bidons sur un ravitaillement privé où j’étais invité par un ami. Après une belle descente et une vingtaine de kilomètres de plat jusqu’à Cluses arrivait le plat de résistance avec la montée du col de Romme (1297m – 8,8 km à 8,9%). Les trois premiers kilomètres à 10,1% de moyenne en plein soleil nous ont mis tout de suite dans l’ambiance avec une température dépassant les 30 degrés. Je supporte mal la grosse chaleur et comme toujours dans ces circonstances, j’ai surveillé mon cardio et j’ai fait deux courts arrêts pour faire redescendre mon rythme cardiaque en dessous de 150. Ce fut la partie la plus dure de cette étape j’ai quand même moins souffert que la semaine précédente sur La Pyrénéenne où la température atteignait 36 degrés dans la montée d’Hautacam. Une agréable descente de cinq kilomètres nous menait ensuite au Reposoir où j’ai pris le temps de m’arrêter au ravitaillement pour faire une dernière fois le plein des bidons et manger quelques fruits secs avant d’attaquer les derniers kilomètres du col de la Colombière (1618m – 7,5 km à 8,5%) dans un environnement splendide. Je connais bien ce col pour l’avoir grimpé à plusieurs reprises notamment lors de la Megève Mont Blanc ou du brevet cyclomontagnard des Aravis. Un léger vent rendait l’atmosphère plus respirable que dans le col de Romme. J’ai toutefois fait un court arrêt avant les deux derniers kilomètres à 10% de moyennes sur les flancs très exposés au soleil de la chaine du Bargy qui sont éprouvants car on aperçoit sans cesse le sommet tout en ayant l’impression qu’on ne l’atteindra jamais. J’étais ravi en y arrivant et j’ai pris quelques instants pour admirer le beau panorama sur la chaîne des Aravis avant de me lancer dans les douze kilomètres de descente nous menant au Grand-Bornand ou était située la ligne d’arrivée que j’ai franchie en ressentant une grande satisfaction après avoir profité au maximum de ce beau parcours sans trop de souffrance.
Je me classe à la 4398ème place en 8h13 sur 11 734 finishers et 144ème sur 615 dans ma catégorie des 60-64 ans.
J’ai retrouvé Pierre Dick qui termine comme chaque année quasiment dans le même temps que moi – seulement une minute d’écart ! – et nous sommes allés ensemble à la pasta party où j’ai retrouvé également quelques amis pyrénéens. Ensuite, nous avons retrouvé Vincent, Yves, Christian, et Jérôme avec lesquels nous sommes redescendu en vélo jusqu’à Annecy avec plus de 200 km et 4000 mètres de dénivelé dans les jambes, une belle journée de vélo !
Je souhaite refaire cette étape du Tour l’année prochaine mais uniquement si elle se déroule dans mes chères Pyrénées …
Pierre Gadiou